France – Madagascar : match nul
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- Mis à jour le samedi 20 janvier 2024 23:21
Le MASF a noté avec éblouissement le double coup (ou le coup double) nécessaire pour mettre dans les filets le ballon sifflant la fin de partie de l’adoption internationale à Madagascar.
Deux arrêtés qui se suivent mais ne se ressemblent pas
Par deux arrêtés successifs des 17 et 23 octobre 2023, le ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères a
suspendu toutes les adoptions des « enfants » ayant leur résidence habituelle à Madagascar par des
personnes résidant habituellement en France. Il s’agit d’une prolongation sans limite temporelle de l’arrêté
du 24 octobre 2022 qui suspendait pour un an les adoptions des enfants ayant leur résidence habituelle à
Madagascar.
La déferlante médiatique
De nombreux media ont repris le communiqué de l’Agence France Presse, nécessairement initié par le
ministère, en résumant l’affaire de manière très simple : le but de cette décision est de stopper les nombreuses
adoptions illicites d’enfants à Madagascar, pays qui comme la France, a ratifié la Convention de La Haye du
29 mai 1993, de coopération entre Etats en matière d’adoption internationale. Elle s’appuie sur les
conclusions d’un rapport du comité de l’enfance de l’ONU publiées le 9 mars 2022. Ce comité prie
instamment les autorités malgaches de prendre toutes les mesures concernant : 1) une recommandation
pressante de mise en œuvre de lois déjà votées avec les moyens nécessaires ; 2) une mise en garde afin de
prévenir des adoptions illégales. Sur ce dernier point, il est intéressant de noter que nulle part le comité de
l’ONU n’énonce que des adoptions illicites ont réellement eu lieu. Une injonction de prudence, mais pas
une analyse de cas concrets qui relèveraient du pénal. De même, le ministère de l’Europe et des Affaires
Étrangères ne fait état d’aucune espèce « suspecte » qui l’aurait amené bien certainement à ne pas autoriser
la poursuite de la procédure et à refuser le visa d’entrée en France. Bref, ce lieu commun de la moralisation
d’un champ supposé miné par essence revient en boucle dans tous les commentaires, trop heureux de
s’engouffrer dans la doxa. Mieux vaut laisser les enfants dans leur pays de naissance, dont le système de
protection de l’enfance est épinglé par le comité de l’ONU, que de risquer de les faire adopter
irrégulièrement.
Comparaison n’est pas raison
Il est intéressant de comparer les deux arrêtés. Dans le premier, la suspension ne s’applique pas à toutes les
personnes résidant habituellement en France qui ont un dossier en attente de proposition d’apparentement.
Dans le second, à l’inverse, seules les personnes résidant habituellement en France auxquelles un enfant a
déjà été proposé pourront aller au bout de leur démarche. Au-delà de l’effet désastreux qu’une telle bévue
peut provoquer chez les personnes dont les dossiers sont en cours, cela démontre pour le moins une certaine
désinvolture tout aussi bien pour les personnes en attente de constituer une famille que pour l’institution de
l’adoption internationale. On peut également s’interroger sur la chronologie des événements. Le rapport de
l’ONU sur lequel se fonde le MEAE est daté de mars 2022, et il conduit à la décision de fermeture
temporaire en octobre 2022. Quels sont les éléments nouveaux qui justifieraient ainsi une extension de la
suspension ? Gageons que les archives du ministère donneront dans quelques décennies l’occasion à des
historiens de nous expliquer les raisons profondes de cette décision.
Le fondement des relations internationales reposant sur la réciprocité, la France vient enfin de se mettre
au niveau de Madagascar, puisque le MEAE reproche à ce pays une administration chaotique, comme il
ressort à la lecture des deux versions de l’arrêté.
Version initiale, autorisant pour l’avenir le dépôt de dossiers nouveaux
Par dérogation à l’article 1er, cette suspension ne s’applique pas aux procédures n’ayant pas donné lieu au
26 octobre 2022 à un apparentement par l’Autorité́ centrale de l’adoption malagasy (ACAM), Autorité́
centrale malgache pour la mise en œuvre de la convention de La Haye du 29 mai 1993.
Version revue et corrigée, l’autorisation est supprimée
Par dérogation à l’article 1er, cette suspension ne s’applique pas aux procédures ayant donné lieu au 26
octobre 2022 à un apparentement par l’Autorité centrale de l’adoption malagasy (ACAM), Autorité centrale
malgache pour la mise en œuvre de la convention de La Haye du 29 mai 1993. »
ci-dessous les deux arrêtés :
Acteurs de l'adoption
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